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Souffle de Vent
Par Enthymion le 11/12/2001 à 1:55:55 (#527319)
« Quel talent
quel courage » se murmurait-il à lui-même. Il savait que quelques années auparavant, il aurait osé faire comme eux. Il nen était plus capable, il ne sen sentait plus la force. Le navire roula brusquement, se pencha sur le côté avec un craquement. Les doigts dEnthymion se tenant à la lisse blanchirent sous leur crispation. Un cri retentit. Un des marins se trouva suspendu, les pieds battants dans le vide, les mains accrochées à un bout de la grande-vergue.
Le galion se redressa lentement, tandis que le marin tentait tant bien que mal de se raccrocher et de regagner la sécurité de la grande-hune. Il y arriva, et Enthymion sentit une pointe dadmiration en lui.
Lobscurité tombait, accompagnant la chape de plomb des nuages menaçants. Il commença à faire si sombre que lhomme, engoncé dans sa cape rouge trempée, ne vit plus le grand-mât. Il entendit un déchirement, accompagné du roulement du tonnerre. Un éclair zébra lobscurité au même instant. Enthymion leva la tête et vit la voile de lourse dartimon se déchirer, sous la pression du vent. En même temps, la drosse de lourse lâcha, précipitant limposante barre de bois sur le gaillard arrière, là où se trouvait lhomme. Un « Attention » fusa dans lobscurité et Enthymion eut juste le temps de se propulser contre la lisse. Un choc sourd dans le hurlement de la tempête, il sentit juste un épais morceau de toile, lourd deau tomber sur sa nuque, lassommant à moitié.
« - Enthymion ! » appelait une voix familière, toute proche. Enthymion se dépêtra tant bien que mal et regarda dans le noir, essayant de percer lobscurité. « Ah ! mon ami ! » Cette voix ne pouvait être que celle dOmbre Blanche. Enthymion tâtonna, et une main le saisit. « Rentrons, cest dangereux de rester ici ! ». Brave Ombre Blanche, qui voyait dans lobscurité
Rentrer
Le mot résonna. Il contenait toutes les espérances dun homme, perclus par une suite de malheur, une éternelle Malédiction. Mais maintenant, elle touchait à sa fin, il le sentait en lui. Enfin, elle naurait de fin que lorsque les tourments, les affres de son âme se seront apaisés, cest à dire lorsque la Mort se penchera sur son visage, avec son sourire énigmatique
Rentrer, rentrer, rentrer
Un gong dans la tête, accompagnant la résurgence de souvenirs enfouis. Retrouver la paisible ville de Windhowl, aux maisons de pierre grise, aux murailles blanchies par le sel marin, les tours imposantes, les chaumières blondes sous le soleil, le souffle du vent
Les chemins de terre noire, le château imposant de Silversky, avec ses tours fièrement dressées, les montagnes noires, presque irréelles et nimbées dun nuage de brume au nord dArakas. Oui, rentrer.
Ouvrir la porte de sa demeure, sasseoir sur un siège et regarder les vergers dehors, aux branches recouvertes dune mince couche de givre. Puis, sentir une douce main aux longs doigts frôler son épaule, dans un geste tendre
Lever son regard vers le doux visage tant aimé, puis lembrasser, murmurer à ses oreilles son nom. Cyloane, Cyloane, Cyloane
Rentrer
Rentrer
Et aspirer à la paix.
« -Lève-toi, Enthymion ! » hurla Ombre Blanche. Enthymion sortit de son rêve, puis se leva. Les deux hommes se tenant mutuellement le bras sengagèrent sur le passavant, descendirent sur le ponton, essuyant des vagues deau. Tant bien que mal, ils rentrèrent dans la chaleur du ventre ballonné du Galion, transis et trempés. Enthymion se retourna pour fermer la porte, mais dans son geste, il sarrêta et regarda à lextérieur. La tempête se calmait, les nuages se dissipaient et il vit la Lune, blafarde, descendant vers lOuest. Il ferma la porte.
Le jour se lèverait bientôt, mais il nétait pas encore rentré
Larmes d'Écume
Par Enthymion le 12/12/2001 à 12:50:52 (#535990)
Enthymion resta silencieux jusquà lamarrage. Les stigmates de la souffrance se mêlaient avec les rides du temps, les traces de rêves inespérés et inavoués. Et lhomme, ou ce quil en restait, semblait enfoncé dans la Nostalgie, embourbé dans le Passé
Cest dun pas nonchalant, distrait quEnthymion descendit à terre.
Le port se trouvait à la lisière des îles dAirain, et sappelait Imlys. Rien de bien attrayant. Les travaux, menés par le Capitaine, durèrent une semaine. Une semaine, où Enthymion resta tout aussi silencieux quà laccoutumée, se levant à laurore et revenant lorsque les Étoiles brillaient avec ardeur. Il ne parla quune fois, sans doute plus, mais en dehors de la présence de son entourage, et Ombre le surprit en train de converser
avec une fille de joie.
Visiblement, Enthymion se contrefichait de la condition de la personne, et sa voix, était à légale de son esprit, monotone, ancré comme un boulet dans les marécages du passé. Quant à la fille de joie, elle sen fichait tout aussi éperdument. Elle resta près dEnthymion quelques instants, espérant quil finirait par la suivre dans une des alcôves de lendroit et la payer. Elle finit par sen aller, et Enthymion continua à parler.
"-
Je me souviens de ces gargouilles de pierre. La première fois que jen ai vu une, en chair, et la cruauté bien ancrée dans leur non-cur, ce fut peu de temps après mon arrivée sur Goldmoon. Il sappelait Devil-Yoda, et, grâce à Artherk, il est mort, bien mort. Pourtant son fantôme hante mon esprit.
Je me rappelle quil tentait de soudoyer un Ecuyer Dragon, le plongeant dans un tourment. Lorsque lEcuyer se confia à moi, ma haine nen fut que plus grande que la résurgence de mes souvenirs, fort anciens, dune autre vie
A lévocation devil, se dessinait dans ma tête limage dune forteresse, dun temple fortifié plus exactement, sur lequel se trouvaient des gargouilles de pierre noire
Une légende les entourait : dantiques êtres malfaisants, certains disent des nains brigands, pillards, transformés en gargouilles pour châtiment. Le temple nain se trouvait des les montagnes noires de basalte, entouré dun fleuve de magma écarlate. Je le sais, jy étais
Le souffle de lHaruspice, faucheuse des Elfes et bientôt des nains se fit sentir. Beaucoup se replièrent dans le temple, lorsque les villes Imdrakhad, Khazadim et tant dautres furent inondés dIchor
Haruspice vint lui-même, forme indiscernable dans lodeur du sang, et réveilla les gargouilles, les devils. Sortant de leur gangue de pierre, leur réveil brutal saccompagna du vol des âmes de bien des nains
Nuit dhorreur
Ils se répandirent par la suite, comme la Peste sur Althéa, servant le soi-disant Maître
Yoda devint donc mon ennemi, et je le haïssais si profondément quil devait sen abreuver
Jen vis dautres : Devil-Kro, Devil-Vlad à la langue poétique et adorateur de sang. Je faillis même assister au mariage de ce dernier, sa fiancée Vulvinia étant une de mes amies. Je devais être témoin, mais Caern le dragon traître vint forcer le prêtre, Père Marcus de prononcer le mariage au nom de lHaruspice. Refusant dassister à cette ignominie, je men allais, le cur plein de rage. Ce fut le prélude du début du combat
"
Ombre entendit un râle. Enthymion cessa de parler, sapercevant que personne ne lécoutait. Il se leva et se dirigea vers la porte de la taverne.
Le lendemain, à laube, le galion appareilla, avec un Enthymion rêveur et un Ombre blanche perplexe. Le jour était levé, mais ils nétaient pas encore rentrés
Que la Force et l'Honneur soient avec toi.
Par Splotch le 12/12/2001 à 15:47:24 (#536940)
Provient du message de Enthymion
... Yoda devint donc mon ennemi ...
Enthy, tu es donc passé du côté obscur ...
*soupire*
Et ne me regarde pas comme ça, toi aussi tu pollues le post des autres, alors bon, hein ?! Bon !
Et puis ça fait remonter ton post.
Par T4C-Mattt le 20/12/2001 à 11:55:14 (#588890)
La Thlorien (Sel d'Écume)
Par Enthymion le 20/12/2001 à 14:18:18 (#589582)
Ombre Blanche et Enthymion se tenaient côte à côte, appuyés sur la lisse brûlante. Ombre observait Enthymion du coin de lil. Voilà quelques jours quils étaient partis du port dImlys, Enthymion navait prononcé que quelques mots. Pourtant son visage était un livre en lui-même et Ombre Blanches, à travers les rides, le hâle, les yeux demi-clos de son ami devinait ce quil avait dû endurer. Les épaules étaient un peu plus voûtées sous le poids de la vie, la barbe se teintait de blanc. Et pourtant, pourtant, Ombre savait quEnthymion faisait encore plus jeune que son âge
Cyloane
La lassitude étreignait Ombre, mais comme à laccoutumée, il ne laissa rien paraître. Voilà trois jours quils navançaient pas, et rien, pas le moindre souffle de vent. Le soleil commençait à sombrer, boule rougeoyante, dans les flots. La fraîcheur nocturne suivrait, ainsi que sa voûte céleste constellée de mille et un diamants. Ombre Blanche laissa Enthymion à ses pensées, sapprocha du pont pour observer les marins, qui allumaient des braseros, dautres qui rentraient se coucher dans leur douillet hamac, attendant leur quart de veille. Deux marins apportèrent des plateaux à Ombre : du porc salé, une soupe de céréales grumeleuse, des citrons contre le scorbut. Ombre Blanche se retourna pour avertir Enthymion, mais ne le vit pas. Surpris et inquiet, Ombre regarda autour de lui, perçant lobscurité tombante de ses yeux noirs. Il fit le tour du gaillard arrière. Finalement, il trouva Enthymion penché par-dessus le rebord, immobile, semblant fixer quelque chose. Ombre nosa interrompre le silence, sapprocha à pas feutrés. Son ami prononça juste un mot : « Regarde ».
Troublé, Ombre sapprocha du rebord, regarda dabord lhorizon satténuant, puis il essaya de suivre le regard dEnthymion vers leau glacée. Il ne vit pas tout de suite, puis, son regard saisit dans londe sombre, les contours dune forme féminine. Brusquement la forme fut troublée, un banc de petits poissons évanescents ridant la surface. Enthymion gardait les yeux fixés, patiemment. Ombre releva le regard vers lhorizon et crut voir un imposant navire de jais dans le lointain, qui disparut
Il rabaissa les yeux, un frisson létreignit. Ce nétait pas la fraîcheur de la nuit, mais ce quil voyait
Il lui sembla voir, comme posé à la surface de leau, le visage de sa bien-aimée Ashley. Machinalement, il crispa sa main sur lavant-bras dEnthymion.
« - Quest ce ? » demanda-til « Vois-tu ce que je vois ? Le visage dAshley ? »
Enthymion bougea imperceptiblement et émit un « chut ». Le silence les environnait de toute part, comme lobscurité. Les chants des marins nétaient plus. Même le crépitement des braseros et des torches semblait si loin. Ombre regarda à nouveau : il y vit un autre visage, assurément pas humain.
De longs cheveux dor, parsemés de coquillages bleutés, de conques damarante, un front large, blanc comme le nacre des perles, deux yeux effilés comme amandes de turquoise, un nez fin, aquilin, deux lèvres fines rosâtres, un menton rond, légèrement effacé. Un visage de femme somptueuse, si magnifique quelle navait rien dhumaine. Les lèvres sentrouvrirent, comme pour dire quelque chose. Juste des paroles inaudibles. Le visage sestompa, une forme dansante apparut, langoureuse dans ses gestes, attirante, qui cambrait ses hanches accueillantes
Ombre et Enthymion ne surent combien de temps ils restèrent à admirer ce spectacle si étrange et si beau. Londe sombre semblait silluminer à chaque mouvement, laissant transparaître un étrange décor onirique, que rien ne vint troubler. Puis, petit à petit, la forme satténua, laissant à nouveau apparaître un visage souriant
qui disparut à son tour
Longtemps, les deux hommes restèrent les yeux fixés à la surface, à la recherche dun de ces signes fantasmagoriques. Finalement, Ombre fut le premier à parler :
« - As-tu vu le visage dAshley et cet autre visage ? »
Enthymion se dégagea de la lisse et recula de quelques pas.
« - Non, jai vu les visages de celles que jai aimées et que jaime, et oui, jai vu aussi ce second visage. » Il poussa un soupir.
« - Par quelle cause ou effet extraordinaire
» commença Ombre.
Enthymion linterrompit : « - Il ny a rien à savoir sur cette Dame
» Ombre regarda, de ses yeux pénétrants, le visage dEnthymion, bizarrement apaisé.
« - Tu en sais beaucoup
» murmura Ombre.
« - Les vieux marins en savent beaucoup » répondit Enthy. Puis, il reprit dans un souffle :
« - Nous avons vu la Thlorien »
Ombre fronça des sourcils : « la Thlorien ? »
« - Oui, la Thlorien, lesprit égaré des flots, lelfe qui dort dans londe, le Sourire dÉcume
»
Ombre sassit et attendit.
« - Il y a bien longtemps, sur Althéa, vivait une femme elfe dune grande beauté, dont le Nom a été oubliée. Elle était lépouse comblée et amoureuse dun de ces Seigneurs Haut-Elfe, à la prestance dun demi-dieu. Leur amour se compte en Lunes de Siècles, et il ny avait pas plus beau couple que celui-ci
Mais lHaruspice vint, et le Seigneur Haut-Elfe délaissa la couche pour parcourir les Sentiers Sanglants de la Guerre. Cela dura des années et elle lattendait seule en sa demeure. Le Jour de la Dernière Bataille advint, où Orback et Lugh affrontèrent côte à côte les séides de Baazul, dEzar, le souffle ardent du Dragon-Traître Caern
Je te laisse deviner ce quil advint de lui
Les sylphes apportèrent la sombre et terrible nouvelle des yeux fixés sur les abîmes de lÉternité. Elle ne la supporta pas. Du haut de sa Demeure surplombant lOcéan, elle se jeta dans les flots, quelle hante désormais avec la Némésis, le Bateau des Âmes. Voilà lhistoire de la Thlorien, la femme des Abysses.
Elle suit la Némésis qui embarque les âmes, et elle les apaise, chante de sa douce voix son amour perdu aux égarés tout en attendant son époux. »
Ombre essaya dordonner ses pensées et le flot de questions qui le submergeait.
« - Le Navire que jai vu, noir, aux voiles tout aussi obscures, à lhorizon, cétait la Némésis ? » Enthymion acquiesça silencieusement..
« - Mais je nai pas entendu son chant, bien que jai vu ses lèvres se mouvoir
» Enthymion esquissa un sourire énigmatique le premier depuis des lustres, pensa Ombre plus tard.
« -Es-tu un égaré, Ombre ? » Ombre réfléchit un instant et fit signe que non. Enthymion reprit la parole :
« - Moi jai entendu son chant, ses doux mots. »
« - Que disent-ils ? » susurra Ombre.
« - Je vais te les dire mot pour mot, car ils sont gravés en moi
»
Jai perdu ma raison de vivre, ma lumière
Un jour maudit, où le sang abreuva la terre
Jai perdu les doux mots, les aériennes caresses
Un Jour Maudit, et depuis jerre sans nul cesse
Plus de pétales mordorées, de blancs sourires
Plus de fontaines deau vitale, de main à tenir
Plus dyeux du bleu de la mer, de langoureux et longs baisers
Je nai pu le supporter, du haut dune falaise, je me suis jetée
Les flots maccueillirent comme une altière reine
Dans lécume blanche se fondent mes larmes, ma peine
Je posais mes pieds sur le sable dor, les étendues de Corail
Depuis, je sauve les âmes égarées de la Némésis, de ses mailles
En cette nuit constellée, jai vu dans tes yeux dobscurité
Les tourments, les affres angoissantes, les plaies du Passé
Vives, doù se déverse lIchor sombre et destructeur
Le malheur est de ce monde, ainsi que la Peur
Les sentiers tortueux du Destin sont longs, vers linfini
Tu nas pas terminé le tien, Enthymion aux-Trois-Vies
Abandonne le voile des Sombres Pensées, continue à marcher
Le sommeil des bienheureux viendra, Vis ! Tu ne peux refuser
Il faut souffrir, supporter, pour un monde de bonheur
Ployer sous la charge, éviter les trop lumineux leurres
Simplement marcher, espérer, sourire, vivre et mourir
Comme mon regretté époux, et, au grand jamais, ne fuir
Alors quEnthymion continuait à parler, la voix grave et chargée démotion, le soleil se pointa, ainsi quun léger souffle de vent. La nuit retirait ses tentacules dobscurité à loccident, mais ils nétaient pas encore rentrés
Par Jon Abishaï le 20/12/2001 à 14:35:40 (#589677)
*fait le tour de ses paperasses*
Par Scribe Ouyar le 21/12/2001 à 14:47:17 (#594098)
*remet sur le dessus de la pile*
*triste*
Par Mabelle le 22/12/2001 à 6:59:47 (#597154)
Et J'ai un frère qui me manque .. *soupire*
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