Je me souviens...

Par Kalder'Shee le 16/10/2002 à 20:26:15 (#2348084)

Un vrombissement irritant me tire doucement de ma léthargie. L’engourdissement s’évanouit peu à peu, et je trouve enfin la force d’ouvrir les yeux. Quelque chose me gratte le bras. C’est une mouche, qui remonte vers l’épaule, sur ses pattes minuscules… Je la chasse d’un revers de la main, tout en observant l’endroit où je repose, d’un regard circulaire. Une arme repose à mes côtés, sur l’arbre au pied duquel je me suis assoupi. C’est la mienne, une grande hallebarde, symbole de ma caste. Et là, des images surgissent dans ma tête. J’ai rêvé… J’ai rêvé si longtemps que je n’arrive plus à me souvenir quand je me suis endormi.

Mon sommeil était si profond, si exclusif, que j’ai même du mal à me souvenir qui je suis. J’observe mes bras, mes jambes couvertes à moitié par un grand kilt, et me lève, me rééquipe. Je me souviens, l’esprit encore embrumé de rêve, d’un monde où j’étais fort différent. C’était un univers beau, certes, accueillant et attachant, mais à présent, il me semble si pâle… Habité de fantômes amicaux, aimables et riants, mais si transparents.

Ces pensées me traversent alors que je déambule dans la nature, et au détour d’un arbre, voici qu’une route s’offre à moi. Un solide pont de pierre surplombe, à ma gauche, une rivière paisible, et un rocher levé, orné du symbole puissant du Dragon, insuffle en moi une force surprenante. Une foule disparate s’agite devant tout cela, marchant vers d’hypothétiques destinations, passant à cheval, ou simplement se reposant sur l’herbe grasse. Je reste là, béat de stupeur, les yeux grands ouverts, avec l’unique idée de tout voir, tout sentir. Et enfin, une image me vient. Enfin, je me souviens.

Je suis proche de Prydwen… Et cette rivière, sereine, remonte jusqu’au Château de Camelot. Il me suffirait de marcher vers le nord, comme il n’y a pas si longtemps, alors que je m’échinais, jeune, à progresser dans ma voie, pour parvenir à cette espèce de Graal… D’abord à pas mesurés, puis, d’enthousiasme, à petites foulées, je me mets en route. Les murailles dures de Prydwen me semblent si douces, alors que je me revois passer par ici, lord d’un jour indéterminé de mon passé... Je longe le cimetière, aperçoit la barque échouée et, déjà à bout de souffle, arrive en vue des tours du pont-levis. Mes derniers pas sont lents, alors que je récupère de mon effort.

Qui pourrait oublier ceci ? Ce moment magique où, s’extrayant de la rosée du matin, le Château des Légendes apparaît au tout jeune voyageur comme un îlot de grandeur dans un océan souillé ? Qui pourrait affirmer, à ce moment, ne pas avoir été touché par l’âme du Vieux Roi, et de ses Héroïques Chevaliers ? Qui pourrait dire, sans cramoisir de honte, qu’il n’a pas rejoint les portes protégées par ces immenses Gardiens, admiré les ciselures, eut le souffle coupé par les dimensions de l’édifice, sans être happé par un puissant sentiment de fierté ?

Ces émotions fédératrices, je les ressens à chaque fois, parce que Camelot, et tout ce qu’elle représente, résonne en moi comme un tocsin de sagesse. Le bourg de Cotswold m’apparaît alors comme un idyllique havre de paix, où la population parle, marche, court et se repose. Cette animation me fait chaud au cœur, et la simple idée que ces gens puissent trouver normal de vivre ainsi me conforte dans mon sentiment. C’est alors, lorsque, soi-même, l’on ne fait plus vraiment partie de leur monde, qu’il faut les observer, et les aimer pour ce qu’ils sont : de simples hommes et femmes.

Par Kalder'Shee le 16/10/2002 à 21:16:46 (#2348428)

Je franchis, distrait par l’éblouissement, l’arche qui me mène au cœur de la Ville de Lumière, et me retrouve au centre de la petite place. Je sais tout… Ma mémoire est à présent limpide, cristalline, comme l’eau de la fontaine qui dégueule des trois têtes de lions. Je me souviens, ici, m’être désaltéré à plusieurs reprises, en attendant une amie chère à mon cœur, afin d’aller chercher avec elle la gloire et la grandeur dans les terres sauvages. Son visage me revient, sa voix, ses yeux, la douceur de ses cheveux blonds… Alors que je m’enfonce dans la ville, une goutte d’eau glisse sur ma joue. Point de larme, mais l’eau des cieux.

D’autres la suivent, et bientôt l’ondée imprègne le sol, sans pour autant m’épargner. Je me souviens, avec un sourire, avoir souvent pesté contre cette pluie incessante, qui me semble maintenant bénie. Elle roule sur moi, imbibe mes vêtements, et c’est un bonheur que d’être plongé dans ce bain divin, alors que j’avance encore, traverse les marchés, admire ces autres fontaines, dont les ciselures me rappellent immanquablement une histoire, peuplée de gens, de discussions, d’émotions aussi fortes qu’impossible à dater. Et je distingue à présent les murs blancs de la Cathédrale…

Elle se dresse, toujours aussi altière, vers un ciel encore menaçant. Son intimidante décoration exprime autant de grandeur que d’humilité, et exalte encore cet appétit épique qui rugit sourdement en mon cœur. Je reste figé, comme paralysé, au beau milieu de la nef. Mon regard parcourt tout ce lumineux panorama comme celui d’un enfant ébahi. Lorsque je sors, un jeune Paladin me croise. Il doit être pressé de continuer à suivre l’enseignement pieux de son Ordre, et ne m’adresse pas un regard.

Au-dehors, la pluie a cessé. Un timide rayon de soleil perce les nuages, leur conférant une aura orangée. Mes pas m’emmènent à présent vers Humberton. C’est une émotion si puissante, de penser revoir, après si longtemps, son village natal. Je vais, à présent d’un pas décidé, vers la porte Nord. A nouveau, les souvenirs s’entrechoquent, jouent à se culbuter, et des images surgissent encore une fois du passé. Mes premiers pas dans Camelot furent ici, je le sais, je le sens. C’est à partir d’ici que j’ai aimé cette ville, que j’ai senti les effluves de grandeur me posséder à jamais.

Et à présent, je suis dehors. J’aperçois les vieux piliers qui bordent la grande allée menant au Palais. La brume s’écarte au loin, et je distingue déjà des murs blanchis à la chaux. Je suis finalement arrivé… Les cheminées crachent une fumée grisâtre, et je crois entendre le martèlement laborieux du forgeron. Plus loin, les montagnes se profilent, augure des Highlands sauvages. C’est ma terre, mon pays. Je pose une main sur le pilier le plus proche, et m’y appuie. La pierre, pourtant rêche, me semble douce, et un profond soupir soulève ma poitrine. Et là, contre toute attente, une goutte d’eau glisse sur ma joue… Mais il ne pleut pas.

Je me souviens de qui je suis. Je suis Kenneth, Kenneth McBraegh.


-- Kenneth McBraegh,

Excellent

Par Zobby_the_fly le 17/10/2002 à 10:24:20 (#2350458)

Ca c un roi :ange:
Joli Kenneth....... vraiment super sympa:amour:
Voila un beau texte ca fais rever, j'adore!!!!!!!!!
vive CLAIRE ECLIPSE:ange: :ange: :ange:
Oyez vous autres compatriotes, comment l'on vit une fois baigné de la divine lumiére dégagée par l'union de notre pére et mére que st le soleil et la lune et quel est notre bonheur :lit: :lit:

:merci:

Par Lyzon le 18/10/2002 à 9:29:39 (#2355948)

Ne pas se souvenir. Non, moi je ne veux pas.
J'attend mon avenir, tout est devant moi.
Je franchirai moi aussi les murailles de Camelot. En conquerante !
J'ai soif de victoire sur la vie désormais...

Hop

Par Alicia Draco le 18/10/2002 à 9:57:49 (#2356096)

Tadammm,
la blonde qu'il attend impatiemment a Camelot, c'est moiiiiii :)


Cheyenne Draco


PS : Le retour de kenneth, vraiment ? ca me remplit le coeur de Bonheur