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Une vieille histoire...
Par Domon le triste le 24/7/2002 à 14:50:48 (#1854025)
« Har har, bien joué mon gars, tu deviens très fort ! » le félicita lhomme désarmé.
« Merci du compliment » répondit simplement ladolescent.
Assez fin, doté dune musculature noueuse, Domon Brugh nen était pas moins un épéiste remarquable. Du haut de ses 15 ans, il parvenait a défaire régulièrement en duel son vieux maître darmes, Ragan Vernion. Ce dernier regardait son élève avec un large sourire, sourire qui pliait laidement la balafre qui lui entaillait la joue. Il lavait reçue quand il était dans larmée, disait il, sous les ordres dAlexandre, il y avait de nombreuses années. Cétait un homme dur, qui avait sacrifié sa jeunesse a son royaume, et pourtant il ne regrettait rien. Il avait vu plus de contrées que la plupart de ses compatriotes, et y avait gagné une réputation non seulement de dur a cuire, mais aussi dexcellent soldat, ce qui lui valait un grand respect de la part de la plupart des gens. Et sa solde nétait pas mal non plus. Maintenant, a 53 ans révolus depuis quelques mois, il occupait un poste dentraîneur dans une des salles darmes de la capitale, enseignant aux fils de nobles les arts du combat, et venant si nécessaire en aide aux miliciens de la ville. Chacun à SilverSky le connaissait, et le respectait.
Il alla récupérer son épée. Oui, décidemment, ce gamin était prometteur
Il lavait rencontré deux ans auparavant. Le jeune garnement sétait introduit dans la salles darmes par une fenêtre, sans que personne ne le remarque. Il revoyait encore la scène.
Il arrivait dans la remise, et était tombé sur le loustic, en train de fouiller dans les épées dentraînement émoussées.
« Par les couilles dArtherk, quest ce que cest que cette petite fouine sélénite ! » sétait il exclamé.
Dun cri, Domon sétait retourné, et, pour se défendre, avait empoigné une épée. Amusé, Ragan lavait regardé faire de grands moulinets désordonnés pour le tenir a distance, puis dun revers de la main la lui avait arrachée des mains, avant de lattrapper par la peau du cou. Le jeune garcon avait glapi de peur mais sétait mis a le frapper de toutes ses forces pour le faire le lacher. Ce qui finit par provoquer lhilarité du vieux soldat, qui restait insensible a ces manifestations de fureur désespérées.
« Héhé, cest pas une fouine quon a là, mais un petit chiot ! Et il mord en plus le bougre ! Har har ! »
Le reposant au sol, il lui avait asséné un des bonnes claques dont il avait le secret, et lui demanda sans autre forme de proces.
« Cest quoi ton nom le mioche ?
_Do
Domon msieur
_Et tas pas honte dagiter comme ca une épée dans MA salle darmes bougre dane !! » rugit Ragan.
Puis, se reprenant : « Tu voudrais que je tapprennes ? »
Le jeune garçon resta sans voix un instant, puis se mit a hocher frénétiquement la tête en signe dassentiment. Depuis lors, ils sétaient entraînés tous les jours, en début de matinée, et maintenant, Ragan avait le sentiment davoir réussi. Domon, à 15 ans, était techniquement aussi bon épéiste que lui-même. Oh, bien sur, il ne maitrisait pas les autres armes à la perfection, mais il ne voulait pas en faire un guerrier totalement polyvalent. Ce qui lui manquait, a vrai dire, cétait de vraies expériences du combat. Il haussa les épaules. Cela lui viendrait bien assez vite, Brehan lui en était témoin.
« Ragan ? »
La voix de son élève le tira de ses pensées. Il le regardait avec un large sourire. Non, décidemment, le mioche navait encore jamais connu de vraies batailles.
« Je
Demain, le maître dArmes reçoit les candidats souhaitant sengager dans larmée. Je vais my présenter. »
Malgré une légère hésitation en début de phrase, il lavait débitée rapidement, comme si il craignait dêtre interrompu. Ce en quoi il navait pas tout a fait tord.
« Quest ce que cest que cette idée la encore ? Tengager ?! Parce que tu crois que tu sais manier une épée, tu te vois déjà héros de guerre ! » Tonna le vieux maître.
_Ragan
. Tu avais mon age quand tu es entré dans larmée, et la situation était plus agitée a lépoque. Nous sommes en paix avec Angélus, que pourrait-il bien arriver ? Je veux voyager, et servir notre Roy à la mesure de ce que je sais faire ! Ca nest pas une noble ambition ? Je ten prie, Ragan !
_Hmpf » Grogna le vétéran. « Je sais ce que cest que lost, tu peux me croire. Et je minquiète de ce que tu risques dy devenir. Certains disent que ça forge le caractère. Foutaises oui ! Ca endurcit les plus durs, et ça écrase les autres, voila le sain effet de larmée sur les caractères ! Jai peur que tu sois encore un peu tendre pour intégrer les rangs.
_Mais
-Laisse moi finir veux tu ! Malgré cela, je vois que tu es déterminé dans ton choix, aussi je vais non seulement te laisser y aller, mais aussi glisser quelques mots en ta faveur aux officiers chargés du recrutement. Tu sais te battre après tout. » ajouta-t-il en souriant.
A ces mots, Domon bondit de joie et lui sauta au cou pour le remercier. Lui tapotant la tète, Ragan ne pu sempêcher démettre une triste pensée. Trop jeune, trop impulsif
« Allez, files ! Tu as sans doutes plein de choses a faire aujourdhui en prévision de demain ! » lui dit il en lui assénant une claque dans le dos. Quand a moi, jai besoin daller prendre une chope, jai le gosier sec de tavoir entraîné, gamin ! » ajouta t il dun ton bonhomme.
Domon sécarta alors, et sélança vers la porte en lui faisant de grands signes de la main. Ragan le regarda partir, songeur.
Par Domon le triste le 24/7/2002 à 17:48:29 (#1855073)
« En tout cas, les taverniers y perdraient beaucoup » se dit Ragan en comptant le nombre de chopes vides sur la table. Apparemment les jeunots avaient passé une bonne partie de la matinée à palabrer sur leurs exploits futurs.
Il reporta son attention sur le marchand qui occupait « sa » table. Un angélusien sans doute, à son air précieux et a ses mimiques dégoûtées alors quil portait a sa bouche son ragoût. « Sacré Sang, le meilleur ragoût de la capitale ! Ces étrangers sont vraiment bizarres ! »se dit il. Le marchand leva les yeux vers lui, et le vieux soldat ne put sempêcher de lui adresser son regard le plus menaçant. A voir avec quelle rapidité il baissa le nez, on eut dit quil trouvait soudain son ragoût bien plus attrayant.
Buvant une longue gorgée de son Ale, Ragan laissa ses yeux se fixer dans le vide, et dériva dans ses pensées alors que le liquide alcoolisé le réchauffait lentement. Domon allait partir à larmée. A la Guerre peut être, se dit il en repensant à lAngelusien. Il secoua la tête. Il était sa seule famille, et il devait bien avouer sêtre attaché au jeune garçon. Le voir partir, même pour un vieux soldat tel que lui, serait un crève cur. Lhivers qui avait suivi leur rencontre, la mère de Damon était morte de maladie. Son père étant décédé quelques années auparavant, le jeune garçon se retrouva seul. Il lavait donc recueilli, et depuis tout ce temps il en était venu a le considérer comme son fils. Vrai ! Ca ne serait pas facile de le laisser partir
Reprenant une gorgée dAle, il laissa de nouveau ses pensées vagabonder, chassant au loin tous ses mauvais pressentiments. Il irait au château le recommander cet après midi, cest le mieux quil pouvait faire
Par Domon le triste le 24/7/2002 à 21:58:05 (#1856273)
_Oui maître Vernion, vous le trouverez dans ses quartiers. » lui répondit le garde.
Ragan entra dans le palais. Par Brehan quil aimait cet endroit ! Cela représentait tout ce pour quoi il sétait battu pendant ces années. Il aimait ces murs épais, centenaires. Il aimait le claquement de ses bottes sur le sol dallé. A chaque fois quil venait ici, il lui semblait replonger dans le passé, ce jour où il sétait engagé a servir Goldmoon.
Enfin, il distingua la silhouette de son vieil ami Mordrick Maensel. Ils avaient pris les armes ensemble il y avait de cela de longues années, mais lui avait choisi une retraite civile, tandis que son ami avait préféré rester dans la garde du palais. Il avait souvent tenté de le convaincre de rempiler, mais toujours Ragan refusait, en émettant la même réponse.
« Je suis trop vieux, et jai eu mon compte démotions. Former des soldats maigrirait, car je saurais quils participeraient a des campagnes ou je naurais jamais ma place. Jaccepte tout simplement de vieillir, voila tout. »
« Alors Mordrick, comment vas-tu, vieux sacripan ! lui lança t il.
_Ragan mon vieux ! Content de te revoir, ça fait une paye ! Oui, je vais bien, et toi donc ? Décidé à tenter ta chance demain ? ajouta t il avec un sourire.
_Eh bien justement, cest à propos de ça que je viens te voir. Tu te souviens de mon élève, le jeune Brugh ? Il veut intégrer les rangs.
_Et toi tu viens me le recommander, cest ça ?
_Exactement. Il est bon, très bon même, mais je doute quil aie le caractère assez trempé pour tenir. Il na jamais participé a un vrai combat tu sais.
_Mhh oui je vois
Mais si tu dis quil est bon, je le prendrai. Quand a ses capacités au combat
nous le verrons assez vite . ajouta t il sombrement.
_Comment cela ?
_Jai surpris des conversations entre le Chambellan et le Maître dArmes
La situation avec Angelus se dégrade de jour en jour. Ils deviennent de plus ne plus exigeants
_Une Guerre ?
_Envisageable. Je dirais presque que la décision a déjà été arrêtée en hautes sphères. Ils nattendent que lincident diplomatique pour tout lâcher.
_Inquiétant ce que tu me racontes la
_Ne ten fais pas, je veillerai sur ton protégé.
_Merci lami ! » Répondit Ragan. Mais il nétait quà moitié rassuré.
_Bon, je te laisse, jai à faire. » Lui annonça Mordrck.
_A bientôt !
_A bientôt Ragan ! »
Il regarda son ami séloigner, les plaques de son armure crissant les unes contres les autres. Une guerre, par Brehan ! Et il allait laisser Domon se jeter là dedans
Bah, après tout, le garde navait émis que des suppositions, Avec un peu de chance, il se serait trompé.
Avec de la chance
Pensif, il sortit du château dans la lumière éclatante de laprès midi. Mais il ny fit guère attention. Son esprit était ailleurs. Au milieu des terribles batailles auxquelles il avait participé, où il avait failli maintes et maintes fois perdre la vie. Il se demandait si lhistoire était destinée a se répéter éternellement de génération en génération.
Par Domon le triste le 25/7/2002 à 20:56:34 (#1859173)
Sans sattarder pour prendre un petit déjeuner, il sortit en courant de la maison. Comme il sy attendait, il ne croisa pas Ragan : le vétéran devait déjà être à la salle darmes à préparer la journée. Dun pas alerte, le jeune garçon se dirigea vers les halles. Lendroit était fortement animé alors que les marchands vantaient sous les arcades les mérites de leur étal. Domon dut jouer des coudes pour la traverser, grommelant contre lidée qui lavait fait passer par ici plutôt que de contourner la halle centrale. Il ne fallait pas quil soit en retard !
Enfin, sortant de la masse grouillante du marché, il put de nouveau voir le ciel au dessus de sa tête, et le château qui se trouvait devant lui. Il avait fière allure en ce jour. Une légère brise faisait claquer les bannières qui trônaient fièrement au dessus des deux tours de garde. Des gens allaient et venaient, tout à leurs affaires, par le porte principale, où seulement deux gardes surveillaient les allées et venues.
« Des gardes du palais » pensa Domon. « Un jour, je serai comme eux, un soldat exemplaire. Peut être mattachera ton à la protection du Roy même ? ».
Le jeune garçon avait la plus grande admiration pour ces hommes qui avaient voué leur existence au Roy. Sans doute tenait il cela de son vieux maître.
Mais il nétait pas la pour visiter le palais. Se renseignant rapidement, il se dirigea vers la pièce où les candidats devaient se présenter. Ses pas claquaient agréablement sur les dalles.
Lorsquil arriva, il en eut le souffle coupé : il y avait déjà près dune centaine de personnes, et il en affluait de tous cotés.
Apres quelques dizaines de minutes, les arrivées dans la salle cessèrent. Il y régnait un brouhaha important. Survint alors un homme vêtu dune imposante armure de plaques, qui vint se places sur une estrade contre le mur. A ses cotés vinrent se placer deux hommes, lun en armure également, lautre en robe. Il les connaissait tous les trois. Devant lui se tenaient rois des hommes les plus importants du palais, voire du Royaume.
Le premier à être entré, vêtu de sa somptueuse plaque de cérémonie, était le maître darmes du Roy, Alexandre, qui allait présider cette réunion. Le second individu, également recouvert de métal, était le capitaine de la garde du Palais, Mordrick Maensel. Domon le connaissait surtout de réputation, bien que son père adoptif et lui soient très amis. On le disait dur, mais intègre. De lavis général, il remplissait sa fonction au mieux, à tel point que, malgré son age avancé, personne navait envisagé de lui trouver un successeur.
Le troisième personnage était de loin le plus inquiétant de tous. Il frissonna involontairement en posant son regard sur cette forme encapuchonnée dans cette robe blanche. On pouvait distinguer deux yeux noirs, tels deux billes dobsidienne, qui malgré leur immobilité apparente, semblaient scruter la pièce attentivement. Son visage était également impassible. Un visage buriné, à la peau mate, sans age. On disait de lui quil était derrière toutes les catastrophes naturelles du royaume. Les mères en menaçaient leurs enfants indisciplinés, ce qui avait bien plus deffet que de parler dorcs ou de trolls. Mais à vrai dire, à part que le Roy lavait rappelé de lexil ou son père, feu sa majesté Théopold, lavait envoyé il y avait maintenant plus dun siècle « Un siècle ! Rien que ça ! Métonne pas quon raconte des trucs sur lui » se dit Domon en adressant une courte prière a Artherk- personne ne savait rien de lui. Mais il était là, lui, Lycaos, grand mage de guerre du Roy, et personne noserait lui demander des comptes.
Le maître darmes prit la parole.
« Jeunes gens de Goldmoon ! Je vois avec plaisir que vous avez répondu nombreux à notre appel ! Cest une grande fierté pour notre royaume que de vous voir tous ici en cette salle, prêts à servir votre Roy ! »
Il marqua une pause, et pas un bruit nétait audible.
« Vous nêtes pas sans savoir que la tache pour laquelle vous postulez aujourdhui ets des plus ardues ! Elle vous demandera un engagement de chaque instant. En tant que soldat de sa majesté, quArtherk le bénisse de sa Lumière, vous donnerez votre vie à votre souverain et à votre royaume. Vos autres engagements devront passer au second plan, ais cest au prix de grands sacrifices que se construit une grande gloire ! »
Murmures dapprobation dans la foule.
« Vous serez amenés a voyager énormément, et sans doute à combattre tout autant, mais noubliez jamais ! Tout ce que vous ferez, cela sera pour la plus grande gloire de Goldmoon, pour votre Roy, sa majesté Théodore XIII ! Longue Vie au Roy ! »
« LONGUE VIE AU ROY ! » rugirent en cur les auditeurs.
Domon était véritablement enthousiasmé. Tout ce dont il avait rêvé allait se réaliser bientôt !
Le Maître dArmes reprit.
« Les examens destines a vous déterminer aptes ou non au service auront lieu dans une pièce attenante, Bonne chance à tous ! »
Sur quoi il fit un pas en arrière. Il échangea quelques mots avec le mage à voix basse, puis tous deux disparurent. Mordrick, resté seul, descendit de lestrade, puis se dirigea vers une porte. De là, Il fit signe à la foule que les examens y auraient lieu. A peine leut il franchi que les jeunes hommes commencèrent à y entrer en file indienne. Domon prit patiemment son tour.
Quand enfin, au bout dune heure environ, il arriva, il se retrouva face au capitaine des gardes du palais.
« Alors mon gaillard, quel est dont ton nom ? » Lui demanda t il dun ton bourru.
_Domon Brugh, Capitaine.
_Ah, cest toi ! Je commençais à désespérer de te voir arriver. Bon, tourne toi un peu que je voie si tu as la carrure. »
Tout en sexécutant, Domon fut dabord surpris de la réaction du capitaine, puis se souvint que Ragan lui avait promis de glisser un mot en sa faveur.
« Cest bon, soldat Brugh ! lui dit Mordrick. Demain, cour arrière du château, au point du jour. Rompez ! »
Domon ne se le fit pas dire deux fois. Saluant maladroitement, il sortit en courant du Palais, décidé à annoncer la bonne nouvelle à Ragan le plus vite possible. Il le trouva comme il sy attendait à la salle darmes, fourbissant les épées dentraînement.
« Ah te voila garnement ! Jvois à ta tête que ça a été une réussite «
Domon, trop heureux, ne fut capable que dacquiescer frénétiquement.
« Eh bien , cest pas une raison pour rester là les bras croisés comme un sacré bon sang dSylien ! Attrape ça ! » bougonna t il en lui lançant une épée. « Un soldat, ça sentraîne, alors hop, au travail ! » grogna t il, mais sans parvenir à cacher son sourire.
Et, comme chaque jour, Domon sattela avec ardeur à son entraînement.
« Sans doute mon dernier entraînement civil ! » se dit il avec fierté.
Par Domon le triste le 26/7/2002 à 19:07:54 (#1864567)
La journée finit par toucher à sa fin. Domon était fourbu : on ne leur avait accordé quune pause dune vingtaine de minutes pour avaler en vitesse un maigre repas, avant de les replacer devant leurs mannequins dentraînement. Avant de leur donner quartier libre, Mordrick leur expliqua quils seraient mobilisés sur le terrain dici une semaine.
Domon quitta le château, perdu dans ses pensées. Partout autours de lui les gens navaient quun sujet de conversation, et la haine de langélusien était palpable dans lair. Un attroupement devant lAisselle du Troll attira son attention, et il ralentit le pas afin de questionner un badaud.
« Un de ces chiens dAngelusiens ! cracha t il. Ils lont attrapé et se sont occupé de lui ! »
Sabstenant de demander de quel « ils » il sagissait, Domon poursuivit son chemin. Pareilles scènes risquaient de devenir monnaie courante désormais, et il devait sendurcir. Il en verrait dautres maintenant quil était soldat.
Il marcha encore quelques minutes avant darriver chez lui. Il poussa la porte qui souvrit dans un grincement, puis pénétra dans la maison. Il y trouva Ragan, dans la remise, qui fouillait dans de vieilles malles poussiéreuses. Ce dernier, sans lever le nez un instant de lobjet de ses recherches, lui lança :
« Je suppose que tu as appris la nouvelle Mhh ?Bien sur, puisque tu as passé la journée au château. »
Il soupira, chose inhabituelle chez lui.
« Et je suppose que tu sais ce que ça signifie ? La guerre mon bonhomme. Fini de frapper des bonshommes en bois, finis les combats amicaux à coup de lame émoussée. Non, en fait je pense que tu nen as pas la moindre idée. »
Il se retourna, plantant son regard dans celui de son fils adoptif. Ses yeux étaient graves, sans la moindre trace de létincelle de malice qui y apparaissait dhabitude lorsquils discutaient. « Un regard froid
» se dit Domon.
Non, laisse moi texpliquer. Dici une semaine, tu tueras ton premier homme. Sans doutes. Puis le deuxième, puis le troisième. Tu laisseras toute ta sensibilité, toute ton innocence, ton enfance, derrière toi, et à jamais. Et si jamais tu ne daignais pas faire ce sacrifice, ils prendront ta vie, sans hésiter. Tu verras tes amis et tes proches tomber à tes cotés, tu les pleureras au début, oh oui
Tout comme tu pleureras sur tes remords de devoir tuer un peu plus chaque jour. Puis peu à peu, tes larmes se tariront, tes yeux sécheront. Et à chaque coup dépée, quand tu moissonneras les têtes et trancheras des membres, ça ne sera plus la rage qui tanimeras, mais linstinct, te poussant à tuer pour vivre, pour survivre. Et la, quand tes frères darmes tomberont, tu ne leur accorderas plus un regard. Tu ne tueras plus leur meurtier par esprit de vengeance mais parce quil se dresse devant toi, simplement, et tu ne te sentiras plus affligé par sa mort. Impassible. Tu resteras indifférent à la mort que tu auras porté chez les autres, indifférent à ce qui tentoure, si ce nest à ta lame et à celui qui se tient devant toi. Alors, oui, alors, tu seras devenu un soldat
Quelle soit bénéfique, ce dont je doute, ou non, cette transformation arrivera. Elle arrivera, ou tu sombreras dans la folie, et une nuit tu retourneras ton arme contre toi, quelle se teinte une dernière fois de sang, de ton sang, pour te faire expier. Voila les choses telles quelles seront. »
Domon était glacé. Jamais son vieux maître navait fait daussi long discours, jamais auparavant il navait parlé avec autant de ferveur, ouvrant son cur de cette manière. Le jeune garçon prit alors conscience de ce quavait été lexistence de Ragan, des cauchemars qui avaient du le hanter, de toutes les horreurs quil avait pu contempler, et de la façon dont larmée lui avait volé sa vie. Par le sang, dans quelle situation allait il sengager ? Incapable démettre le moindre son, il restait figé par la tirade du maître darmes, tel une statue de sel. Et Ragan le regardait. Il navait pu sempêcher de lui dire, de lavertir de ce au devant de quoi il allait. Oh bien sur, il savait quil était trop tard pour reculer maintenant. Il savait que désormais il avait instillé le germe de la peur en son élève, et que cette peur avait plus de chances de lui coûter la vie que de la lui sauver. Malgré tout, il ne parvenait pas a sôter de lidée que ces avertissements lui seraient bénéfiques. Se plaint on dêtre réveillé à coups de pieds si cest pour éviter de se faire trancher la gorge ?
Rompant le silence, Ragan reprit.
« Jai entendu dire que les aspirants seront placés en caserne des demain, pour des raisons de sécurité, donc autant que je te donne ça tout de suite. »
Il plongea les mains dans un coffre et en ressortit une armure de plaques.
« Cétait la mienne pendant mes années de service. Elle est sans doute encore un peu vaste pour toi, mais ça te protégera toujours mieux que cette cochonnerie de maille quon te donnera. »
Il sortit les pièces unes a unes, les disposant avec précautions sur une toile au sol.
« Elle est tout ce quil y a de plus ordinaire, rien de magique comme on lit dans les contes. Du bon vieil acier. Les articulations et les courroies sont en bon état, je les ai graissées pendant toutes ces années. Et je tiens également à te donner ceci. ».
Il ressortit de la malle une forme oblongue enroulée dans du tissus gris. Dévoilant son contenu, Ragan fit apparaître une lame brillante, bien que constellée par endroits de petites taches brunes. Une belle épée, dont la garde semblait malgré tout bien plus fonctionnelle quornementale. Et autant que Domon pouvait en juger, la lame était terriblement affûtée.
« Je te présente Morsereg, mon arme. Celle-ci est bel et bien enchantée par contre. » Murmura t il. « Son tranchant ne sémoussera jamais et
» Il grimaça. « Elle est vivante. Oh bien sur, pas come un chie ou un cheval, mais elle a des pulsions, et une conscience, bien que ténue
Cest une arme très dangereuse que je te remets là, mais elle ma sauvé la vie maintes fois, et jai le sentiment quil en ira de même pour toi. »
Domon eut un regard interrogatif.
« Non, je ne te dirai pas comment je suis entré en sa possession. Un jour peut être, mais pas maintenant. Mais pour lheure, remballons tout cela, tu les emmèneras demain avec toi. Allons manger. »
Rangeant les pièces darmure et la lame dans un baluchon, Ragan avait le cur serré. Il allait être séparé de son élève. Il pria intérieurement quil sen sorte indemne.
« Ne tinquiète pas. » résonna une voix dans son crâne. « Je veillerai sur lui, mon vieil ami
»
Hochant la tête, il termina le paquetage et se releva. Puis il prit Domon par lépaule et lentraîna dans la pièce principale pour préparer le dîner.
Il serait veillé, soit. Mais devait il sen réjouir ?
Par Domon le triste le 27/7/2002 à 2:17:29 (#1865951)
Cela faisait déjà cinq jours, et leur formation était déjà presque achevée, quand Mordrick convoqua le petit groupe auquel appartenait Domon.
« Bien. » Entama t il. « Je vous ai convoqués car vous êtes ceux de ma section dont lentraînement est le plus abouti, et que nous avons besoins de soldats pour une mission simple, sans pouvoir en détacher dautres divisions. »
Il fit une pause en scrutant la vingtaine de visages devant lui.
Aussi, vous allez être envoyés dans les montagnes, au sud est de Ravens Dust. Des rumeurs circulent comme quoi un campement angelusien aurait été établi la bas. Je voudrais que vous alliez faire un travail de reconnaissance. Ne prenez pas de risques inutiles. Si vous constatez une présence ennemie, relevez sa position et revenez. Vous partez dans une heure. Rompez. »
Chacun regagna alors les baraquements pour se préparer. Domon brûlait dexcitation : il allait enfin prendre une part active a cette guerre ! Il ne pensait à rien dautre en assemblant les pièces de métal de son armure. Il lavait déjà essayée a plusieurs reprises auparavant, et lavait trouvé étonnement confortable pour une cuirasse de cette taille, et le laissant libre de ses mouvements. Ragan sen était vraiment bien occupé durant toutes ces années. Enfin, une fois harnaché convenablement, il ceignit Morsereg. Ressentant comme a chaque fois des picotements dans les bras et la nuque, il se demanda une fois de plus comment un soldat tel que Ragan Vernion avait pu entrer en possession dune arme comme celle la. Il faudrait vraiment quil lapprenne un jour.
Sur ce, Domon se dirigea vers ses compagnons qui lattendaient a lextérieur. Puis ils se mirent en route.
Par Domon le triste le 29/7/2002 à 3:55:15 (#1870764)
Ils de rester sous couvert de la foret plutôt que de longer la cote. Ils seraient abrités en cas dembuscade, et Brehan savait que les angelusiens étaient de bons archers.
Une heure sécoula encore, sans rencontrer âme qui vive. Puis, ils commencèrent à entendre des bruits, puis des voix. Ils firent silencieusement halte. Le campement devait être très proche maintenant. Ils tendirent loreille afin despionner les conversations, et ce quils perçurent les glacèrent deffroi. Les angelusiens avaient mené des incursions secrètes en Goldmoon, et avaient placé des Marques. Celles cis permettraient ensuite à leurs mages douvrir des portails sur la longue distance entre leur royaume et Goldmoon, y faisant pénétrer massivement leurs troupes.
Dun commun accord, et décidant quils en avaient assez entendu, les soldats firent demi tour afin de venir rapporter tout cela au capitaine le plus rapidement possible. Ils parcoururent une lieue environ, avant de tomber sur des éclaireurs angelusiens. Ceux-ci étaient en infériorité numérique, une quinzaine environ, mais ils avaient pour eux dêtre des soldats aguerris.
Le combat sengagea des quils se trouvèrent face a face. Un compagnon de Domon sécroula dans un gargouillis sinistre, la gorge transpercée. Dun geste vif, le jeune homme eut tout juste le temps décarter la lame qui plongeait vers lui pour lui faire subir le même sort. Il était encore sous le choc, mais se força a se concentrer en se rappelant les paroles de son maître. Si il faiblissait, ne serait ce que quelques instants, il serait perdu. Gardant cela a lesprit, il se rua vers son adversaire, brandissant Morsereg au dessus de sa tête. Langelusien para le coup sans difficulté, étonné toutefois de la force avec laquelle il avait été porté. Ils tournaient lun autour de lautre, portant des attaques tantôt vicieuses tantôt brutales. Domon commençait a se fatiguer, et quelques coups frappèrent brutalement sur sa cuirasse, sans toutefois heureusement réussir à lentailler. Soudain, il eut menvie irrésistible de se retourner pour frapper derrière lui. Malgré lapparente imprudence que constituait le fait de tourner le dos à son adversaire, il céda à la pulsion et frappa. La tête de langelusien qui avançait dans son dos pour lembrocher roula à terre dans une grande éclaboussure de sang. Se retournant a nouveau, il lança puissamment son bras derrière lui. La consternation se peignit, mêlée de douleur, sur les traits de son précèdent adversaire, alors que Morsereg tranchait sans mal les épaisses mailles de sa cotte darmes, déchirant les chairs non protégées qui se trouvaient en dessous.
Domon, haletant, se retourna une fois encore. Il nentendait plus un bruit. Ses compagnons, du moins les sept qui restaient debout, le regardaient dun air incrédule. Haussant les épaules, il leur fit signe quil etait grand temps de se remettre en route. La nouvelle était dimportance, et la rapporter au plus vite pourrait sauver beaucoup de vies.
Ils reprirent leur marche silencieuse, triste davoir perdu une douzaine des leurs. Mais malgré cette tristesse, Domon crut percevoir tout au fond de lui un rire satisfait.
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